dimanche 28 octobre 2012

Manifeste des Indignés d'Amiens




Manifeste des Indignés d'Amiens

L'année 2011 marque un tournant important sur le plan politique à l'échelle mondiale. Un peu partout sur les cinq continents, des citoyens conscients des ravages et dérives de la crise systémique du néo-libéralisme se mobilisent et se mettent à occuper des places et lieux symboliques. La liste est longue et interminable de tout ce qui ne rép
ond plus aux besoins et aux attentes des majorités. Cependant, un trait commun existe : l'extrême accumulation des richesses et la concentration des pouvoirs de décision. En résumé, une spoliation de la démocratie avec l'installation d'un système oligarchique prenant des formes adaptées à chaque pays.

L'impact de la force de ce nouvel élan d'humanité a permis dans un premier temps de dégager des dictatures de longue date en Tunisie et en Égypte. Il a permis aussi d'ébranler nombre de régimes similaires, ouvrant la voie à des processus révolutionnaires qui ne font que commencer. Tout ce que ces sociétés possèdent d'archaïsmes, contradictions et refoulements collectifs sont à nouveau au devant de la scène exprimant la recherche de nouvelles constructions sociales.

Le continent latino-américain soumis pendant une longue période à des dictatures militaires est engagé également dans un processus historique de transformations fondamentales. Précurseur dans l'installation du néo-libéralisme, ce continent a connu de manière quasiment calquée tout ce que subissent actuellement la plupart des pays européens : restauration d'un capitalisme sans règles, chômage de masse, privatisations à outrance, liquidation de l'Etat-Providence et retour de l'Etat-Gendarme. Les similitudes entre l'Argentine des années 2000 et la Grèce d'aujourd'hui sont exemplaires.
Sur le continent européen, devenu depuis ces dernières années l’œil du cyclone néo-libéral, le combat pour la démocratie se révèle plus complexe par la persistance d'un simulacre de participation démocratique qui laisse encore place à des illusions. L'alternance au pouvoir et aux affaires de conservateurs et socio-libéraux masque une hégémonie sans précédents des classes dominantes sur l'ensemble des sociétés. Les majorités citoyennes ne sont plus représentées sur le champ politique dont les mécanismes profitent à des spécialistes et professionnels de la politique. Comme dans d'autres domaines, on peut à juste titre parler de monopole de la représentativité politique, avec un casting établi de longue date afin de satisfaire la pérennité du système.

Les Indignés Espagnols l'ont parfaitement compris : « Ils ne nous représentent pas ! » étant leur slogan principal. En France, l'analyse du simulacre démocratique s'applique également, avec des spécificités dues à son histoire. Le schéma bipartite (UMP/PS) reste dominant pour l'instant, Et c'est sur la question européenne en tant que modèle néo-libéral qu'on parvient à lire le plus facilement qu'ils sont les deux faces d'une même pièce de monnaie.

Nous subissons une accélération en France et en Europe de l'importation du modèle néo-libéral. En parallèle, ce modèle est traversé par une crise qu'il a lui-même engendré et qui peut se résumer à la spéculation financière. L'accumulation et concentration, la production et reproduction de capital financier sans finalité d'investissement ou de redistribution gangrène toutes les sociétés au bénéfice de quelques minorités.

S'appuyant sur la crise, les oligarchies européennes en profitent pour peaufiner les modalités néo-libérales imposant les dogmes de manière drastique ou progressive avec comme conséquence des régressions sociales et politiques : perte de droits individuels et collectifs, paupérisation de masse, destruction des services publics...

Dans un tel contexte, à Amiens comme ailleurs, des Indignés ont pris leur place et la place depuis bientôt deux ans. Nous pressentons et nous savons que le processus global de résistance et de mobilisation contre l'oppression néo-libérale ira en s'amplifiant et prendra des formes diverses et inattendues. Parce que la planète est devenue déjà un grand village, nos actes et nos pensées s'inscrivent dans cette globalité complexe.

Indignés d'Amiens comme d'ailleurs, nous voulons d'un autre monde et nous refusons les logiques actuelles qui nous mènent à des impasses et des tragédies. Nous voulons pour commencer que des véritables rapports de démocratie se rétablissent. Choisir dans la liberté et la démocratie comment nous voulons vivre aujourd'hui et demain et ne plus continuer à survivre comme hier et avant-hier.


Amiens, Place Gambetta, Novembre 2012.

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